Le brochet |
Le brochet a toujours été, et reste encore pour beaucoup de pêcheurs, le carnassier roi, le poisson de sport par excellence.
Aujourd'hui certains lui préfèrent le sandre, d'introduction récente en France, ce qui est à mon avis un non sens : certes le sandre est un poisson passionnant, mais sa défense est médiocre. Le brochet, lui, est un combattant exceptionnel, capable de rush tout en puissance ou de sauts spectaculaires au dessus de l'eau.
Sa morphologie est si typique qu'on peut difficilement le confondre avec une autre espèce. Inutile donc d'entrer dans le détail, un simple coup d'oeil à la photo permet de se faire une idée. Il faut simplement noter sa forme très fuselée, son "bec de canard", les nageoires dorsales et anales placées très en arrière, et surtout une dentition redoutable.
Les dents du brochet sont si tranchantes qu'aucun fil de pêche n'y résiste. C'est pourquoi on utilise systématiquement un bas de ligne (1) en acier. Gare aux doigts quand on décroche l'hameçon de la gueule d'un brochet, même petit. Des coupures en coups de rasoirs attendent le pêcheur maladroit...
D'un naturel agressif quand il se met en chasse, le brochet a alors tendance à attaquer toute proie passant à proximité de son poste d'affût, par contre il répugne à poursuivre. Son truc c'est plutôt l'attaque surprise, et s'il rate sa cible en général il n'insiste pas et préfère attendre une autre occasion. C'est pourquoi quand on manque un brochet en pêchant au lancer, il est très fréquent de le reprendre au passage suivant.
Conséquence de cette agressivité, il se pêche quasiment à toutes les techniques : vif, mort manié, mort posé, et tous les leurres possibles et imaginables. Les techniques actives (lancer) sont les plus productives, tandis que les pêches statiques permettent souvent de prendre les plus gros.
Autrefois abondant, le brochet a tendance à se raréfier, même si localement les effectifs restent très satisfaisants. Les trois principales causes de cette raréfaction sont :
Pour toutes ses raisons, il est de notre intérêt de ne pas prélever des brochets inconsidérément, ce n'est pas une espèce qui se renouvelle aussi facilement que d'autres (perche, sandre).
Pour l'avoir pêché dans certains pays comme l'Irlande, la Russie ou le Canada où il est très abondant, j'ai pris conscience de la mauvaise situation en France.
Et j'ai donc décidé de relâcher systématiquement tous ceux que j'attrape, gros ou petits. Les Anglais et Hollandais font de même depuis des années, et chez eux la pêche du brochet est très bonne, malgré des problèmes de pollution comparables aux notres.
Bien sûr il n'y a rien de mal à en garder un de temps en temps, mais tuer systématiquement tout brochet de plus de 50 cm "parce qu'on y a droit" est une attitude irresponsable, digne d'une autre époque.
Une frayère est une zone de reproduction pour les poissons. Elle doit réunir certaines caractéristiques variables selon les espèces (profondeur, température, nature du fond, végétaux). Inutile de dire que la qualité et l'abondance des frayères jouent un rôle capital dans le maintient d'une population.
Le brochet pond au début du printemps. En rivière, il recherche les secteurs inondés par les crues. Ces zones peu profondes se réchauffent plus vite et sont riches en plancton, conditions indispensables à la survie des alevins.
Hélas, le drainage et le déboisement des bassins versants, le recalibrage et la régulation des rivières font que les zones favorables ne s'inondent plus assez longtemps, et chaque année la ponte peut être détruite par assèchement prématuré.
Même chose en lac de barrage, ou les variations rapides et fréquentes de niveau anéantissent souvent tout espoir de reproduction.
C'est pourquoi les populations de brochets se maintiennent beaucoup mieux en étang, où le niveau est relativement constant.
Une note d'optimisme : la tendance est à la réhabilitation des "zones tampons" (zones inondables avec couverture végétale, jouant le rôle d'éponges). Il ne fait guère de doute que le brochet serait l'un des premiers bénéficiaires de ces mesures. retour
Glossaire : (Cliquer sur le nom pour revenir au texte)
1- Bas de ligne : longueur de ligne intercalée entre la ligne principale et l'hameçon (ou le leurre). Son rôle est variable : il peut servir de "fusible" en cas d'accrochage (il est alors choisi moins solide que la ligne principale); il peut au contraire être plus solide, dans le cas d'un bas de ligne en acier destiné à résister aux dents d'un brochet.
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© 2002 - Michel Tarragnat