Technique de pêche | |||
La pêche des gros brochets - 2ème partie
|
Lors du tournage d'un DVD destiné à être distribué en kiosque dans le numéro d'avril 2013 du magazine la Pêche et les Poissons, j'ai eu l'occasion de découvrir sa méthode particulière pour capturer régulièrement des brochets de plus du mètre.
Voici le trailer de cette vidéo (NB : vous devez avoir installé Flash Player).
Arnaud Fileppi 42 ans Habite en Savoie Guide de pêche spécialisé dans la traque des gros brochets. Son site web Son blog Tél. 06 80 36 05 90 |
Grands lacs, gros leurres à grand rayon d'action pour grands poissons, mais aussi grandes profondeurs et grands espaces.
Arnaud ne raisonne pas en terme de postes mais de zones : quand il parle de tenues des gros brochets du Léman il faut comprendre cassures de plus de 100 m de long, plateaux de plusieurs hectares, pleine eau.
Le lac Léman est riche en gros et même très gros sujets, on le sait, mais pour autant les localiser et les faire réagir n'est pas une simple formalité, loin de là.
Car de grands espaces sont quasi déserts, d'autres grouillent de fourrage mais les brochets n'y sont pas (pour des raisons énigmatiques), d'autres retiennent du brochet en bonne densité mais pas de vifs, etc.
Compte tenu de l'immensité du domaine pêchable et des variations saisonnières, pêcher à l'aveuglette ou de façon stéréotypée est souvent voué à l'échec.
Arnaud a donc mis au point une stratégie de recherche de zone basée à la fois sur sa connaissance du lac et une utilisation poussée de l'électronique : sondeur et GPS.
Il y parvient en mettant en ouvre un mode de prospection rapide à l'aide de son électronique embarquée, qui est je dois dire assez spectaculaire.
Cela consiste à longer les grandes cassures ou de scanner les zones de profondeur adéquate en suivant une trajectoire sinusoïdale qui lui permet de sonder plusieurs profondeurs sur le même secteur.
Dés qu'il arrive sur des fonds de 40 m il pique vers la berge, dés que le fond remonte au-dessus de 10 m il re-pique vers le large, etc. Le but de cette méthode est évidemment de laisser le moins possible de surface inexplorée.
La prospection peut se faire à vitesse modérée (5-10 km/h) et avec des zigzags serrés sur les secteurs déjà identifiés comme porteurs.
Il s'agit alors surtout de vérifier la présence de fourrage, son état de stress révélateur d'activité prédatrice (nous y reviendrons) et bien sûr de chercher à localiser un ou plusieurs gros brochets.
Elle peut également se faire à vitesse soutenue (25-30 km/h), ce qui suppose une sonde et un sondeur parfaitement réglés pour ne pas « décrocher » et perdre l'image à ces vitesses-là.
Le but est alors de défricher de grandes surfaces en éliminant les zones vides et en cherchant des concentrations de poissons, même ponctuelles.
Compte tenu de la taille du lac, un tel travail d'exploration ne peut s'envisager qu'à vive allure, sous peine d'y consacrer trop de temps.
Là encore, Arnaud recherche des boules de fourrage accompagnées d'échos de prédateurs, avec un penchant pour les bancs de perches « maillées », assez facilement reconnaissables au sondeur, et qui traînent souvent à leur suite un ou deux très gros brochets.
Le Léman est riche et l'on y trouve de nombreux bancs de poissons fourrage, notamment de perchettes, parfois concentrées en bancs énormes, parfois en boules de moindre importance (quelques milliers d'individus tout de même).
La difficulté ne consiste donc pas à trouver du poisson, mais à essayer de déterminer quelle boule pêcher, autrement dit celle qui est accompagnée de brochets supposés actifs.
Cette phase importante se fait en interprétant les images du sondeur.
Une boule stressée par la présence de prédateurs actifs est décollée du fond, déformée et parfois même éclatée en plusieurs parties.
Des échos de poissons plus gros ou même très gros les accompagnent : généralement des brochets.
Dés qu'Arnaud repère un des ces échos prometteurs, il le marque au GPS, ce qui lui permet ensuite de revenir sur ses pas et positionner son bateau à portée de lancer (en tenant éventuellement compte de la dérive s'il y a du vent).
Cette méthode s'apparente autant à de la chasse qu'à de la pêche, et il y a une excitation certaine à savoir que l'on lance son leurre sur une zone habitée par un ou plusieurs très gros brochets (ou supposés tel).
Bien entendu il ne suffit pas de les avoir vus au sondeur pour les prendre, loin s'en faut.
Ils peuvent être inactifs, focalisés sur un type de proie, il peut même s'agir d'une autre espèce de grande taille (carpe ou autre), mais au moins cette méthode permet d'augmenter statistiquement ses chances de succès.
Au-delà de son aspect hyper-technologique qui ne séduira sans doute pas tout le monde, cette approche a le mérite de mettre en évidence certains aspects comportementaux des gros brochets que je soulignais dans la première partie de ce dossier.
À savoir qu'ils se trouvent bien souvent situés dans des secteurs qui échappent à la pression de pêche ordinaire : loin du bord, en profondeur, perdus en pleine eau, etc.
L'électronique permet alors de pallier à l'absence quasi totale de repères visuels ou d'indices permettant de soupçonner leur présence.
Mais la méthode d'Arnaud Fileppi ne se limite pas à ça : quand un gros brochet est détecté il faut tenter de le faire mordre et c'est là que l'aspect purement technique prend le relais sur l'aspect tactique.
Car ces gros poissons, on le sait, sont moins actifs et se nourrissent moins souvent que leurs congénères de taille standard.
Leur gabarit leur permet en effet de s'attaquer à des proies de grande taille, longues à digérer.
Pour Arnaud, la solution passe par l'utilisation de leurres de grande taille, bien plus aptes à obtenir une réaction de ces gros paresseux qu'un leurre de taille modeste.
Compte tenu des conditions de pêches rencontrées sur le Léman (brochets profonds voire très profonds), le poisson nageur n'est guère envisageable et le leurre souple s'impose assez naturellement.
Les modèles qu'il utilise sont assez classiques mais presque toujours de grande taille : 6 à 9 pouces, soit 16 à 23 cm, et assez lourdement lestés (30 à 55g) de façon à atteindre rapidement les profondeurs et à pouvoir y être animés assez vite si besoin est.
Plusieurs raisons à ce choix :
- un leurre de ce gabarit possède un rayon d'action nettement plus important (il est perçu de bien plus loin qu'un petit leurre),
- il constitue de par sa taille une menace potentielle pour le poisson fourrage et permet, animé convenablement, de faire éclater une boule de vif, ce qui crée un remue-ménage susceptible d'exciter les brochets présents et provoquer une touche de réaction (c'est notamment le principe du Divinatör),
- il peut susciter chez un gros brochet non chasseur une réaction hostile (compétition, territorialité) ou opportuniste (grosse proie facile à prendre).
L'animation est variable et doit bien entendu répondre à l'humeur changeante des brochets : agressive (en dent de scie avec tirées rapides), linéaire (récupération continue près du fond avec des pauses pour laisser redescendre le leurre) ou lente (genre sandre au mort manié).
Il faut tout essayer et parfois combiner ces animations : un brochet qui suit le leurre récupéré régulièrement se décide souvent à le prendre lors d'une accélération brusque ou quand on le remonte rapidement au bateau.
Il faut également être capable d'animer entre deux eaux, quand les échos sont nettement décollés du fond.
La technique du count down est alors utile, ainsi qu'une bonne dose de feeling.
De même, il faut bien surveiller sa bannière après le lancer, quand le leurre coule rapidement, car les touches à la descente (poissons suspendus) sont relativement fréquentes.
La méthode Fileppi n'est sans doute pas exploitable partout, du moins sans de sérieuses adaptations aux contextes d'autres biotopes.
Mais elle donne une idée assez précise de l'approche des pêcheurs de gros brochets, qui ne recherchent pas à « faire de la touche » (ils veulent la qualité plutôt que la quantité) et qui ont une vision assez large du biotope et des tenues potentielles.
Lors de notre session pour le tournage de cette vidéo, nous avons eu peu de touches, une petite dizaine en deux jours avec de longs passages à vide, mais deux brochets passaient le mètre (100,5 et 113 cm), pris sur le plus gros leurre (23 cm), et deux autres passaient les 90 cm.
Des chiffres qui parlent d'eaux même...
Son matériel en détail
Le poids des leurres utilisés par Arnaud (souvent plus de 100g) impose un matériel puissant.
Pour des raisons de discrétion dans les eaux ultra-claires des lacs alpins, son bas de ligne est en fort fluorocarbone, et relié à la tresse par une « pointe de discrétion » de plusieurs mètres en fluorocarbone plus fin.
Son rôle est d'éloigner la tresse du leurre et d'amortir le « bruit » qu'elle provoque, notamment en raison de l'air qu'elle emprisonne.
Cannes St Croix (en fonction du poids total du leurre) :
- Slop-N-Frog Bass Series, 2.10m, 20
- 45g
- Swim Bait Bass Series, 2.35m, 30
- 85g
- Downsizer Musky Series, 2.20m, 55
- 120g
- Lip Stick Musky Series, 2.35, 30-170g
Moulinets :
- Shimano Calcutta DC
- Shimano Curado 301
Tresses :
- Power pro en 19/100
- 8 Braid Daiwa en 25 et 30/100
Pointe de discrétion en fluorocarbone 3core Parallelium 40 ou 43/100
Bas de ligne en fluorocarbone 3core Parallelium 90/100
Têtes plombées Delalande et Fox en 28, 35 ou 55g, hameçons 5/0 ou 6/0
Hameçons triples Owner ST36 n° 2, 1/0 ou 2/0
Acheter des leurres pour le brochet
Autres articles sur la pêche du brochet
• Les bas de ligne modernes en titanium et fluorocarbone
• Le brochet : fiche signalétique
• Les techniques pour le brochet
• Le brochet au crankbait grand plongeur
• Le brochet en eau profonde aux leurres souple avec Sylvain Legendre
• Vidéo : In the poursuit of the water wolf"
• Le brochet aux jerkbaits avec Alain Cavard
• Divinatör mode d'emploi avec Mathieu Alexandre
• Brochet : mâle ou femelle ?
• Brochet : leurres durs ou leurres souples ?
Page d'accueil > Espèces > Brochet > Techniques
© 2013 - Michel Tarragnat